L’ADOLESCENT HUMAIN EN CHANTIER

L’ADOLESCENT HUMAIN EN CHANTIER – CLAIRE MARSOT 

Nous, parents ou adultes, pouvons avoir une image négative des ados : ils s’opposent, font des « conneries », trainent en bande, ne veulent pas travailler, trainent au lit ou sur leurs écrans. Nous avons entendu « petits enfants, petits soucis, grands enfants, grands soucis ». Les souvenirs de notre propre adolescence sont plus ou moins sympas et nous abordons l’adolescence de nos enfants avec appréhension. 

Et vous les jeunes, peut-être avez-vous déjà entendu ce genre de propos : « l’adolescence c’est l’âge bête, il fait sa crise d’ado, on ne peut pas faire confiance aux ados ». Cela peut vous inquiéter ou vous révolter quant à l’adolescence que vous êtes en train de vivre. 

L’adolescence commence avec la puberté : entre 10 et 11 ans chez les filles, et 11 et 12 ans chez les garçons, c’est le début de la transformation de l’enfant en adulte. Cette période se termine vers 25 ans ! 

Sous l’influence des hormones, le corps se transforme progressivement en corps d’adulte. Ces changements font vivre de nouvelles sensations et émotions, nous en reparlerons dans un autre article sur la sexualité. Le corps grandit de 10 à 25 cm en 2 ans ! ce pic de croissance entraîne une tension des ligaments car les muscles ne s’allongent pas aussi rapidement que les os. Cette poussée déstabilise le corps de l’ado, le centre de gravité se déplace rapidement et le cerveau n’arrive pas à suivre.

Cela explique la maladresse, la fatigue, le manque de tonus musculaire et de coordination que vous pouvez vivre les jeunes ! Pendant cette phase de croissance, les adultes s’agacent de voir les jeunes « vautrés » en position de 127 degrés (angle entre le dos et les jambes), ils interprètent cela comme un manque de respect ou de motivation : en réalité c’est une position neutre qui réduit les tensions, proche de la position « gravité zéro ». Cet angle est aussi celui des sièges des astronautes et de la classe business d’Air France.

Les jeunes, peut-être avez-vous du mal à vous endormir le soir, et du mal à vous lever le matin ? La sécrétion de mélatonine (hormone qui déclenche l’envie de dormir) est perturbée et décalée d’environ 2h. C’est comme si vous aviez 2h de décalage horaire avec les adultes. Quand le réveil sonne le matin c’est comme s’il était 4h ou 5h du matin pour vous. Alors que vous avez besoin en moyenne de 9h de sommeil par nuit, quand ce besoin n’est pas satisfait vous pouvez vous sentir irritable, anxieux et inattentif. Il serait plus adapté à votre horloge biologique que les cours commencent à 10h. Une astuce : diminuer toute sorte de lumière vive, dont celle des écrans 1h avant d’aller se coucher car elle retarde d’autant plus la sécrétion de mélatonine. Musique, lecture, massage, peuvent aider à s’endormir. 

Une transformation majeure a lieu dans votre cerveau ! Celui-ci se transforme en un cerveau d’adulte qui devient spécialiste. Toutes les expériences que vous avez vécues depuis votre existence (même in-utero) ont créées des milliards de connexions neuronales dans votre cerveau. Au signal de la puberté le chantier commence, toutes ces connections sont revisitées et réorganisées. Les connections les plus utilisées ainsi que celles qui ont été créées lors d’une expérience intense sont conservées, les autres sont supprimées, on appelle cela l’élagage synaptique. Les connections conservées sont entourées de gaine de myéline qui permet aux informations de circuler plus vite. Comme sur le réseau routier, un chantier crée des perturbations et en même temps des opportunités de créer de nouvelles voies. 

Pendant cette période votre cerveau est sensible au stress : pression des adultes, reproches, regard des autres, pic d’hormones, manque de sommeil, peur, honte, insécurité, frères et soeurs, déclenchent des réactions d’attaque (claquage de porte, cris, insultes) de fuite (évitement, s’enfermer dans sa chambre, éviter le contact) ou de figement (ne rien pouvoir faire, être comme paralysé, ne plus pouvoir réfléchir). Dans votre cerveau le cortex préfrontal qui se situe sous votre front régule habituellement le stress et les émotions, il permet d’organiser, d’anticiper et de donner du sens à ce que vous vivez. Comme il est en travaux, il ne joue pas toujours bien son rôle c’est pourquoi vous pouvez perdre le contrôle de vos réactions et vous sentir submergés par vos émotions. En même temps c’est aussi parce qu’il ne tempère pas que vous les jeunes osez prendre plus de risques que nous. Les antidotes du stress sont l’ocytocine et la dopamine, ces hormones qu’on fabrique quand on fait des câlins, quand on partage un bon moment avec d’autres, quand on a du plaisir dans une activité. Les jeunes, prenez soin de vos besoins, remplissez votre réservoir d’ocytocine et de dopamine Parents, adultes, prenons soin de ce magnifique chantier qui se déroule sous nos yeux, en fournissant un environnement serein pour nos jeunes.

Article proposé par Claire Marsot 

Spécialiste de la relation, Coaching parental, Familial et couple, Thérapie pour enfant, Conférences et Formations, Analyse des pratiques professionnelles; Ateliers pour les parents. 

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